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5 septembre 2011 1 05 /09 /septembre /2011 07:50

Bien qu’au plan mondial, l’eau soit gérée à 90% par le public, en France sa gestion est partagée entre le privé (pour 72% des cas) et le public. 3 grandes sociétés se partagent le gâteau de la gestion privée : Véolia, Suez et la Saur.

Quelle est la situation actuelle en Charente-Maritime ?

Rappelons pour commencer que la loi rend responsable chaque maire de la distribution d’une eau de qualité dans sa commune, quelque soit le mode de gestion retenu.

En Charente-Maritime, quelques communes, parmi les plus urbanisées, La Rochelle, Saintes, Rochefort, Jonzac, Saint-Jean-d’Angély, Royan, ont conservé une gestion autonome de leur adduction d’eau.

Parmi elles, certaines se sont déterminées pour une gestion publique à travers une régie, c’est le cas de La Rochelle ou de Rochefort, d’autres ont, par le biais d’une DSP (Délégation de service public), confié la gestion de leur distribution d’eau à une entreprise privée. Véolia pour Saintes jusqu’en 2013 ou Jonzac jusqu’en 2011, la CER (La Compagnie des Eaux de Royan est à 100% une filiale de la Saur) pour Royan jusqu’en 2010 puis Véolia depuis 2011, la Saur pour Saint-Jean-d’Angély (contrat renouvelé en 2004).

Une vingtaine de syndicats intercommunaux se sont constitués surtout dans les zones rurales et ont soit confié leur eau à la régie publique émanation du syndicat départemental de l’eau, la RESE (Régie d’Exploitation du Syndicat des Eaux), soit délégué la gestion aux entreprises privées déjà citées, CER, Véolia, Saur.

Les arguments invoqués par les tenants de la DSP

Malgré un important mouvement en faveur du retour de l’eau au public, pour justifier le renouvellement des délégations de service public, les élus qui ont choisi cette solution présentent généralement les arguments suivants : 

Les entreprises privées seraient plus compétentes en raison de leur taille (référence aux fameuses « économies d’échelles).

Les entreprises privées fourniraient une eau moins chère.

Les entreprises privées seraient à même de réaliser des investissements importants que ne pourraient réaliser des régies.

Les entreprises privées fourniraient une eau de meilleure qualité.

Les entreprises privées  seraient plus réactives en cas de problèmes…

Confier l’eau à des fonctionnaires serait s’exposer à une rupture d’approvisionnement en cas de grève

On a pu entendre cet argument même de la part d’élus censés être de gauche : si on confie la gestion à des fonctionnaires, en cas de conflit social, on risque de ne plus avoir d’eau. C’est ainsi que Christian Grimpret, élu radical de gauche, président du syndicat La Rochelle Nord, a osé présenter le problème dans Sud-Ouest !

L’argument « historique »

Techniquement, il n’est pas possible de changer l’état des choses actuelles, qui est un produit de l’histoire et aucune solution ne peut être meilleure que celles adoptées jusqu’ici. Ce serait en effet renier les élus qui ont trouvé ces solutions.

La démocratie représentative

Les élus l’ont été pour prendre les décisions ad hoc et c’est ce qu’ils ont fait. Les abonnés et encore moins les associations n’ont donc pas à s’occuper de ces décisions. Au mieux, puisqu’ils sont aussi électeurs, ils n’ont qu’à voter différemment la prochaine fois.

L’argument idéologique (qui laisse pantois) : vouloir que l’eau ne soit pas source de profit serait une simple profession de foi, une position de principe intenable devant la réalité des faits, etc.

Pourquoi nous ne sommes pas d’accord ?

Les entreprises privées sont plus compétentes en raison de leur taille ? C’est une contre vérité ! En Charente-Maritime, la RESE, régie publique du département, gère 76% des communes et 48% des abonnés. Sa compétence égale au moins celle des sociétés privées et que l’on sache, l‘eau est parfaitement distribuée dans  les communes qu’elle gère, au moins aussi bien qu’ailleurs.

S’il est vrai que certaines communes sont d’une taille trop réduite pour espérer une régie autonome, rien n’interdit qu’une régie regroupe plusieurs communes volontaires. À elles de choisir l’assiette nécessaire et suffisante pour assurer un fonctionnement technique valable et un fonctionnement démocratique assurant une  transparence de gestion. Elles l’on fait en général pour se regrouper au sein de syndicats intercommunaux. Rien ‘empêche ces mêmes syndicats de créer des régies.

Au plan national, on peut aussi imaginer un service public fédérant les régies locales pour préserver la démocratie de proximité et mutualisant leurs compétences.

Les entreprises privées fournissent une eau moins chère. C’est une contre vérité !

Partout en France, l’eau en régie publique est moins chère d’au moins 30% en moyenne.

En Charente-Maritime, la RESE fournit une eau moins chère que partout ailleurs et au même prix pour tous ses abonnés.

L’eau de La Rochelle est moins chère que celle du syndicat Nord qui délègue à la Saur.

On peut légitimement s’étonner devant cet état de fait et constater que si, à chaque fois dans la réalité, l’eau est plus chère lorsque sa gestion est privée (ce qui est logique puisqu’il faut aussi payer les dividendes des actionnaires qui ont spéculé pour investir dans l’entreprise), à chaque fois qu’une étude est commandée à un cabinet soit-disant « expert », la conclusion est que l’eau sera plus chère si sa gestion est publique ! Ce fut le cas à La Rochelle-Nord comme à Saintes.

Interrogeons-nous aussi sur ce qui permet parfois au privé de revendiquer des dépenses de salaires plus basses que le public. S’il leur faut moins de salariés ou à un tarif plus bas, est-ce vraiment un avantage pour la société à une époque de ch^mage et de bas salaires ?

Les entreprises privées sont à même de réaliser des investissements importants que ne pourraient réaliser des régies. C’est une contre vérité !

« Dieu fournit l’eau, l’homme paye les tuyaux ! », tel est l’argument développé par le PDG de Véolia pour justifier les spéculations financières qui soit-disant permettraient à son groupe de fournir l’eau.

Rappelons que le principe en vigueur en France est que « l’eau paye l’eau ». Autrement dit, quelque soit l’investissement réalisé, c’est l’usager qui paie.  Les réseaux, d’autre part, restent la propriété des communes ou des syndicats intercommunaux.

Les entreprises privées fournissent une eau de meilleure qualité et sont plus réactives en cas de problèmes. C’est faux !

La qualité de l’eau ne dépend pas de son mode de gestion. D’aileurs, la gestion de la crise de l’eau à Royan a montré récemment que les sociétés privées n’avaient pas été meilleures (c’est un euphémisme) dans la prévention que les autres, la CER et Véolia se rejetant d’ailleurs les erreurs supposées de gestion à la figure.

Confier l’eau à des fonctionnaires c’est s’exposer à une rupture d’approvisionnement en cas de grève. Cet argument est inadmissible !

Les employés de la RESE sont-ils plus souvent en grève que les autres ? La régie de La Rochelle a-t-elle des problèmes de distribution d’eau liés au caractère public de cette régie ? D’ailleurs, ce problème ne s’est jamais produit nulle part et les fonctionnaires, infirmiers, médecins, soldats, profs, juges, pompiers et tous ceux qui ont besoin d’eux jugeront de la valeur de cet argument…

L’argument de l’histoire. C’est un piètre argument !

La complexité du système actuellement en vigueur est effectivement la résultante de décisions accumulées depuis soixante ans, et elle contribue grandement à son opacité. N’est-il pas temps de remettre tout à plat et de prévoir un système meilleur ? On peut vraiment s’interroger sur l’utilité de ces élus qui  ne se sentent capables que de continuer l’existant sans s’interroger sur l’avenir ni essayer de le modifier dans un sens de progrès !

La démocratie représentative. Un débat utile par ailleurs !

 Le débat entre démocratie représentative et démocratie directe ou démocratie participative n’a pas vraiment sa place dans notre propos mais il est évident que la démocratie première qualifiée n’est pas suffisante si nous voulons avoir un rôle pour représenter utilement l’intérêt des usagers de l’eau, si nous voulons plus de transparence dans les décisions et aller vers un système de service public plus efficient.

L’argument idéologique : Est-ce que X ≥ X + RÉAC ?

 Oui, notre démarche esr bien basée sur le principe que l’eau ne doit pas être une marchandise comme les autres et en aucun cas, devenir une source de profit. Mais, non, notre position n’est pas seulement « idéologique ».

 Au contraire, le dogmatisme réside dans la négation de l’évidence : il est forcément moins cher de payer x  pour l’eau que x € + RÉAC  [RÉAC = la RÉmunération des ACtionnaires].

Conclusion

Si aucun des arguments opposés à la gestion publique de l’eau ne résiste au simple bon sens,  ceux qui sont en sa faveur sont nombreux et convainquants. Que ce soit pour son prix ou sa qualité, sa politique de production, d’adduction et de traitement, l’eau est trop importante pour continuer à laisser sa gestion aux mains des intérêts privés.

Pour promouvoir une politique de l’eau dans l’intérêt commun, il faut la soustraire aux appétits commerciaux. L’eau ne doit pas être une marchandise. Le service public doit rester ou redevenir  public.

 

 

 

 

 

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