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13 octobre 2008 1 13 /10 /octobre /2008 15:04

Compte-rendu des débats du 9 octobre 2008 salle de l’Arsenal à La Rochelle



Pour sa première réunion publique après quelques mois d’existence seulement,  CEP 17 réussit son pari :

Une cinquantaine de personnes participent jeudi 9 octobre 2008 au débat organisé par l’association de défense des usagers de l’eau, salle de l’Arsenal à La Rochelle.

Le président de CEP 17, Daniel Vince, développe les principes et les objectifs de l’association, tant au plan général que local.

« Quelques mots et quelques chiffres en introduction à notre rencontre :

·        1,5 milliard de personne n’ont aujourd’hui pas accès à l’eau potable.

·        1,1 milliard n’ont pas accès à de l’eau saine pour leurs besoins quotidiens.

En avril et en juillet 2008 des pays ont été touchés par des émeutes de l’eau au Bangladesh  et  au Sénégal.

La pénurie de l’eau est-elle réelle ou supposée ?

Ce que nous savons c’est que l’eau est essentielle à la survie de l’humanité.

Les industriels l’ont bien compris depuis très longtemps.

Ceci dit, le constat c’est que l’accès à l’eau pose déjà de sérieux problèmes dans les pays pauvres, ce n’est pas rentable, et les industriels  n’y vont pas. Ils ont tout intérêt à propager l’idée que l’eau est une marchandise en voie de raréfaction pour en augmenter le coût. L’idée de la pénurie, réelle ou supposée, permet en fait de faire avaler les augmentations des coûts d’exploitation et d’imposer des traitements onéreux pour continuer à fournir les populations en eau potable. C’est tout bénéfice pour les industriels !

[…]

Quelle réponse voulons-nous apporter à cette question :

Est-ce que l’eau est une valeur marchande comme les autres, comme le prétendent les industriels ou est-ce un bien naturel au service de l’humanité ?

Pour nous l’eau est un bien naturel, l’eau n’est pas une marchandise et les services de l’eau encore moins. Pour nous, la gestion publique de l’eau coule de source !

Des enjeux locaux : On le voit, il s’agit bien d’un débat mondial qui nous concerne toutes et tous mais ce débat passe aussi, par des enjeux locaux, et notamment en termes de gestion de l’eau.

La situation actuelle autour de La Rochelle est assez significative de ce qui se passe ailleurs ; faisons un point :

Actuellement 13 communes de la CDA et 6 communes hors CDA ont accepté que  le syndicat intercommunal d’adduction d’eau auquel elles ont confié la gestion de l’eau, la délègue à une société privée : la SAUR.  

Ces communes sont liées par un contrat qui prendra fin le 31 décembre 2009 ;  ENFIN !

La question qui nous anime ce soir est donc de savoir si un nouveau contrat sera signé, ou non, avec le même prestataire, ou avec un autre ? Dans les mêmes conditions que l’actuel ?

Mais avant de se poser ces questions encore faudrait-il avoir débattu de la validité d’une telle délégation de gestion de service public.

Le syndicat Nord peut et doit prendre la décision d’engager de réelles  études préalables et comparative des coûts de gestion.

Cependant nous considérons que cela ne suffit pas, et nous voulons aussi que le syndicat, les collectivités territoriales, les élus, montrent plus de transparence et débattent de la question avec les citoyens, usagers de l’eau, qui ont le droit de connaître, de savoir et de donner leur avis.

Nous y veillerons !

Par exemple en exigeant une étude préalable nous permettant de connaître les  coûts réels d’une gestion privée, ceux d’une gestion publique,  pour les usagers de l’eau. 

[…]

Voici 3 propositions d’actions :

·        Organiser des débats publics dans vos collectivités

·        Rencontrer vos élus

·        Organiser une consultation populaire sur ces questions

Pour finir je vous invite tous à débattre !

Je vous invite également à porter ces questions avec nous sur la place publique, dans vos collectivités territoriales, avec vos élus, vos collègues, vos voisins.

Nous mettons notre association à votre disposition pour toutes les initiatives que vous pourriez prendre,  soit en y adhérant, soit en agissant au plan local, ou les deux. Pour animer et porter ce débat nous avons besoin de votre volonté.

C’est pourquoi je vous invite à rejoindre  CEP 17 !

MERCI DE VOTRE ATTENTION

 

Le Vice Président, Denis Thibaudeau, présente ensuite les excuses de certains élus locaux : Messieurs Grimpret, Léonard, Juin, Blanchard ; sachant que tous les maires des communes adhérant au SIAE de La Rochelle Nord, ainsi que les conseillers généraux des cantons concernés avaient été personnellement invités.

L’un des maires concernés, Mr Juin, considère comme entachées d’erreurs nos constatations sur l’absence de transparence de la gestion de l’eau et nous fait la morale : « L'enjeu de l'eau en soi, et des missions de service public plus généralement ne peut se satisfaire du moindre errement (sic)» et il considère qu’il y a des confusions dans la brochure  que nous avons distribuée aux élus de la CDA, sans aller toutefois jusqu’à préciser lesquelles.

Afin de mieux éclairer l’absence des intéressés, Denis Thibaudeau explique comment CEP 17 avait dans un premier temps fait des demandes « amicales » et orales, puis écrites, puis écrites en recommandé avec accusé de réception, pour obtenir des informations qui sont normalement publiques, sans jamais obtenir jusqu’à ce jour la moindre  communication de document.

« Se pose donc la question : où est la place du débat aujourd’hui ?  Si nous ne disposons pas des documents officiels, nous ferons appel à la CADA (Commission  d’Appel pour les Documents Administratifs).

Les élus eux-mêmes ont-ils les informations nécessaires pour effectuer un vrai choix de gestion ?

En auront-ils le temps puisque l’appel d’offres doit intervenir 1 an avant la fin des contrats, c’est-à-dire avant la fin de cette année ? »

Il donne ensuite la parole à Jean-Luc Touly, président d’ACME France (Association pour un contrat mondial de l’eau) :

« C’est avant l’appel d’offres qu’il faut choisir le mode de gestion, public ou privé !

Toutes les enquêtes le prouvent, que ce soit celle de l’UFC Que Choisir -dont tout le monde a entendu parler- ou d’autres, l’eau est moins chère de 13 à 45% en régie publique.

Les profits des entreprises privées dans le domaine de l’eau sont de 25 à 60%.

Et  tout cela dans l’opacité la plus grande. Le seul document généralement disponible est le rapport annuel du délégataire dans lequel on affirme que tout va bien quant à la qualité de l’eau. Mais sous quels contrôles ? Aucun ! Côté finances, on trouve quelques chiffres concernant les dépenses et les recettes. Dans les faits, trouver des informations relève du parcours du combattant…

Le compte d’exploitation comporte 4 éléments qui sont autant d’arnaques  possibles!

Les frais de personnel – les compteurs – les produits financiers ou leur absence – les travaux prévus

Concernant les frais de personnel, chaque agence suit plusieurs contrats à la fois. A quoi alors  à quoi correspond vraiment la masse salariale imputée? Chez Veolia, la surfacturation a parfois atteint 270% !

Les compteurs sont loués et amortis en 10 ou 15 ans mais changés en moyenne tous les 25 ans et n’ont jamais d’entretien.

La partie de la facture qui va à l’établissement public n’est reversée par les sociétés délégataires que 6 à 9 mois plus tard. Pendant ce temps, l’argent travaille. Où ces produits financiers apparaissent-ils ? Ils représentent pourtant  jusqu’à 30% du chiffre d’affaires.

Enfin les contrats très longs incluent l’entretien des canalisations. Mais en l’absence d’état des lieux en début de contrat, il est impossible d’en vérifier la matérialité à la fin. D’autant que les gros travaux restent à la charge des collectivités locales  qui payent ainsi 2 fois.

Un autre problème a été celui du droit d’entrée maintenant illégal mais qui sévissait autrefois en compensation de la très longue durée des contrats de délégation (jusqu’à 30 ans). A Toulouse, par exemple, en 1990, 475 millions de francs avaient été versés dans les caisses de la ville et à faire baisser les impôts locaux. Mais ce montant a été ensuite comptabilisé avec un intérêt de 15% dans le prix de l’eau facturé aux Toulousains.

Enfin, pour parfaire le tableau, on a retrouvé souvent des maires, battus aux élections, à des postes d’employés des sociétés d’eau avec des salaires mirifiques avoisinant parfois le million d’euros annuel. On frôle le système mafieux !

Pour revenir au plan local, mais c’est la même chose partout en France, posons-nous la question : pourquoi les élus ne sont-ils pas présents ce soir pour débattre calmement face aux citoyens de la justesse de notre point de vue ? Leur place est ici dans le débat, pourtant. Peut-être considèrent-ils la délégation comme leur pré carré ?

Un mot sur la régie pour terminer. Elle serait constituée de salariés de droit privé. Seuls le directeur et  le responsable seraient des fonctionnaires. On reprendrait les salariés de la SAUR aux mêmes conditions salariales  et ils travailleraient sur place. La Régie est un système réversible et ne constitue pas un risque. C’est une expérience à faire. »

Après cet exposé, la parole est donnée au public et les échanges se succèdent. En voici quelques exemples :

Question : Monsieur Commenge, (ancien directeur de l’UNIMA) « Il est certain que nul ne peut aller contre ce qui a été dit sur la situation mondiale. Un enfant meurt toutes les 25 secondes pour des problèmes d’eau. Une directive européenne  décide en 2000 que l’eau ne doit pas être un bien marchand comme les autres. Mais au plan local, quels sont les buts de l’association repris dans ses statuts ? Il faudrait toujours satisfaire aux 3 critères que sont la durée, le lieu et la matière. Pour la durée, elle est indéterminée et c’est bien. Le lieu, c’est la Charente-Maritime et n’est-ce pas un peu trop ambitieux ? Quant à la matière, c’est l’eau, mais ne serait-il pas utile de préciser laquelle ? Ce ne peut-être que l’eau de la consommation humaine ? Je suis pour une régie par philosophie, et il faudrait savoir ce que ça coûterait.

Réponse – Patrick Job (secrétaire CEP 17) Ne vous inquiétez-pas, nous n’avons pas l’intention de régir les marées…

Question - M. Commenge- Quels marais ?

Réponse - Patrick Job les marées « ées », pas les vôtres, Mr Commenge, mais c’est bien à l’adduction d’eau que nous nous intéressons.

Réponse – Denis Thibaudeau Nous avons choisi comme assiette la Charente-Maritime car les mêmes problèmes s’y posent un peu partout comme l’actualité royannaise par exemple, le montre, et nous voulons bénéficier de l’expérience des autres et leur faire bénéficier de la nôtre en fédérant les compétences.

Intervention de Madame Muset (conseillère municipale de Périgny et déléguée au SIAE de La Rochelle région Nord) - J’avoue ne pas toujours tout comprendre au fonctionnement du syndicat auquel je suis déléguée, ni à la délégation du service public de l’eau au privé, mais je suis sûre que les élus veulent le meilleur pour leurs concitoyens. Le syndicat a fait appel à un  cabinet conseil pour étudier les différentes possibilités. C’est vrai que le contrat avec la SAUR est un peu bâtard [sic] mais je me demande si une régie est possible et n’est pas difficile à mettre en place ?

Denis Thibaudeau : Un bureau d’études, ou un cabinet conseil ? Comment s’appelles-t-il ?

Madame Muset : Je ne sais pas.

Denis Thibaudeau : Je comprends les inquiétudes des élus. Ils ne se sentent pas assez  armés,  alors, pourquoi changer ? Mais nous bénéficions de l’expérience de la CDA. Il y a l’outil, la cohérence géographique, politique, on ne part pas dans le vide, et c’est moins cher.  C’est la responsabilité des élus, des citoyens. Il faut se donner du temps pour réaliser l’étude comparative.

 Jean-Luc Touly : une régie n’est compliquée à mettre en place que si on s’y prend au dernier moment. C’est pourquoi il serait utile de prolonger le contrat avec la SAUR d’un an en l’état.

Une personne du public : Qui prend la décision ?

Jean-Luc Touly : C’est le syndicat. Le Conseil municipal doit auparavant s’emparer du débat. Cela a-t-il été fait dans votre commune ?

Une personne du public : Il n’est pas normal que tout le monde ne paye pas l’eau au même prix.

Une personne du public  Les gens sont-ils conscients du problème ? Pourquoi ne met-on pas le Président du Syndicat devant ses responsabilités ?

Joël Péchereau, membre de CEP 17 : Il est évident pour moi qu’il faut laisser l’eau au public et ne pas en faire une marchandise. Mais il faut créer un rapport de forces, et rester optimiste, le débat de ce soir est déjà un pas en avant.

Denis Thibaudeau : Le débat autour de la gestion de l’eau mérite que le public s’en empare et que les décideurs communiquent réellement les informations.

M.Commenge : La Régie de La Rochelle ne pourrait-elle pas s’étendre au niveau de la CDA ?

Denis Thibaudeau : Une commune seule ne peut pas partir du syndicat, les décisions de ce genre demandent la majorité des délégués et c’est presqu’impossible. Même si la CDA représenterait une certaine cohérence.

Jean-Luc Touly : l’intercommunalité existe et on ne peut pas en sortir comme ça.

L’heure avance et  Daniel Vince clôt les débats pour cette fois en annonçant que la prochaine initiative de CEP 17 sera un appel à renouveler pour un an le contrat à la SAUR de manière à permettre à l’indispensable débat public préalable de se dérouler sereinement : « gestion publique ou privée ? »

 

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